CHAPITRE V

Visite illustrée et anecdotique du Canal.

 

 

VIII ) Douzième kilomètre

a ) Aqueduc de la Concia

Le ruisseau de la Concia passe sous la Départementale № 31, l'aqueduc est en contrebas, à 130 m de l'entrée du tunnel.
Ouvrage d’une longueur de 13,8 m.

 

Aqueduc de type très particulier: il n'y a pas de voûte, mais un pilier qui retient le radier au milieu du ruisseau (le seul aqueduc de ce type à avoir été observé).

Un dispositif de décharge (sans doute caché par les ronces) avait pour fonction de couper toute circulation juste en amont du tunnel pour permettre à un homme d'entrer à l’intérieur.

 

L'aqueduc de la Concia et son atypique pilier.

 

b ) Tunnel du Stiletto

Le tunnel passe sous le col du Stiletto, jusqu'à 34 mètres sous terre.
Ouvrage d’une longueur d’origine de 558 m, il mesure aujourd’hui environ 700 m.

 

Images 80 et 81 : sous le parking du Géant Casino, au pied de l’enseigne, l’entrée du tunnel protégée par des planches.

Image 82 : la sortie du tunnel
 sous le parking d’Iveco.

Le souterrain est ouvert dans une roche assez dure, mais qui se décompose à l'air libre. Il a donc fallu le revêtir de maçonneries.

A l’origine le tunnel était flanqué de hautes tranchées qui s’étendaient le long de la route nationale, longues de plus de 300 m chacune.

Les tranchées, de part et d'autre du tunnel, étaient soutenues par de hauts murs de pierre munis d’un jeu d’escaliers en granite qui permettait de descendre au bord du canal.

 

Détail de l'entrée du tunnel sur le plan de 1874 [8], on y voit représentés les escaliers, on remarque le nom du propriétaire: le Duc de Padoue1.

 

Ces ouvrages ont été busés et comblés afin d’établir les parkings des sociétés de cette zone industrielle qui se développe le long de la route.

L’entrée sous le supermarché n’est pas celle d’origine, qui se situe plus profondément sous le parking. La sortie côté Iveco est en fait le bout de la buse.

Le percement du tunnel et l’aménagement des tranchées constituaient le troisième lot des travaux. Le 4 mai 1868 ce lot est adjugé à l’entrepreneur Raïmondi qui a déjà réalisé quelques beaux édifices du Cours Grandval. Dès 1869 les problèmes vont commencer et retarder la mise en eau du canal.

L’entrepreneur porte plainte car il estime que les travaux qui lui sont payés par l’Etat 52 Francs par jour, lui reviennent en réalité à 71 Francs. Les ingénieurs estiment, pour leur part, avoir établi les prix avec le plus grand soin d’après une expérience faite sur deux puits.

Après les problèmes juridiques, ce sont les ouvriers italiens qui sont atteints par les fièvres. Il faut alors recruter des ouvriers insulaires aux exigences démesurées selon l’entrepreneur. Celui-ci dit ne plus être en mesure de faire face aux dépenses de 1,50 Francs par jour pour acheter les 1,75 litres d’huile d’olive nécessaire à l’éclairage du tunnel et aux 3,60 Francs pour la paie journalière des mineurs. Pour les ingénieurs, Monsieur Raïmondi réalise des bénéfices. Quant aux problèmes du chantier, ils sont dus à son manque de surveillance et de vigilance. Monsieur Raïmondi aurait souvent été vu en ville au lieu d’être sur le chantier.

Mécontent de ces conclusions, Raïmondi publie un mémoire pour se justifier [9].

A la sortie de la buse, le canal longe la RN 194 sur quelques dizaines de mètres avant de franchir la nationale. Le canal étant plus haut que le niveau de la route, il a fallu employer, pour la franchir, un siphon.

 

Superposition du plan cadastral représentant la tranchée d'amont du tunnel et d'une vue aérienne (Google Earth) du parking du Géant Casino qui la recouvre aujourd'hui.

Vue aérienne de Mezzavia en 1951 (IGN).

L'eau, ralentie par l'entrée du tunnel puis par le passage en siphon sous la route s'accumule dans les tranchées, le plan d'eau est plus large que souvent la route de Mezzavia.

 


 


  1. Louis Henri Hyacinthe (26 novembre 1814 - Paris † 27 mars 1888 - Paris), 2e duc de Padoue (1853), préfet de Seine-et-Oise (1849), maître des requêtes au Conseil d'État, conseiller d'État (1852), sénateur (1853), et vice-président du Sénat, secrétaire d'État, ministre de l'Intérieur (1859), député de la Corse (arrondissement de Calvi, 1876-1881), grand-croix de la Légion d'honneur. Il est révoqué en 1876 de ses fonctions de maire de la République pour s'être rendu aux festivités de la majorité du Prince Impérial en exil en Angleterre Il est le fils du Général Jean-Thomas Arrighi de Casanova, 1er duc de Padoue, dont la statue trône à Corté sur la place qui porte son nom.